Comment protéger le patrimoine d’une personne âgée et en assurer la bonne gestion ? L’intérêt du mandat de protection future ou de l’habilitation familiale.
Nos aînés atteignent des âges de plus en plus élevés et développent parfois des pathologies lourdes et des handicaps sévères.
Cette génération de personnes très âgées n’a pas, dans la plupart des cas, vu ses parents ou grands–parents vivre aussi longtemps. Cette situation a pour corollaire une absence parfois complète d’anticipation en matière de protection et de gestion du patrimoine. Quand rien n’a été fait, la solidarité familiale doit s’enclencher.
Lorsque parents ou grands-parents ne sont plus capables d’agir au mieux de leurs intérêts, les ennuis commencent. On ne compte plus les heures passées au tribunal pour obtenir une décision du juge des tutelles, permettant d’effectuer des actes de gestion ou de disposition sur le patrimoine d’une personne devenue vulnérable : mise en location de l’ancienne résidence principale afin de financer une maison de retraite adaptée, retraits sur des comptes épargnes ou des contrats d’assurance-vie, ventes de biens loués… les exemples sont nombreux.
Afin de faciliter la gestion de ces cas complexes, le gouvernement a prévu deux grands dispositifs :
- Le mandat de protection future : permettant à toute personne majeure de prévoir, en cas d’altération de ses facultés, d’être représenté par un tiers.
- L’habilitation familiale : permettant à un proche de représenter un membre de la famille, si les facultés de la personne sont altérées.
La différence entre les deux dispositifs est une question de timing. Le mandat de protection future est rédigé en amont, par une personne souhaitant se protéger en cas d’altération de ses capacités. L’habilitation familiale est demandée une fois que la personne à protéger n’est plus en possession de toutes ses facultés.
Mandat de protection future
Un mandat de protection future notarié, est un acte réalisé entre le mandant (la personne qui veut être protégée) et le mandataire (celui qui représentera le mandant si le mandat est activé) devant un notaire. Le mandat sera rédigé par le notaire et définira précisément les pouvoirs du mandataire.
Les mandats non notariés sont légaux, mais nous recommandons vivement le recours au notaire pour des raisons : de conseil, de responsabilité, de conservation de l’acte, de date certaine, de force probante (un élément permettant d’établir la véracité). En outre, les actes sous seing privé ne sont valables que pour les actes conservatoires ou de gestion courante. Ainsi, il n’est pas possible, par exemple, de prévoir de vendre un bien immobilier pour financer une chambre en EHPAD puisqu’il s’agit d’un acte de disposition.
Si des actes ne sont pas explicitement prévus, le recours à une autorisation du juge des tutelles sera impératif. Les actes de disposition à titre gratuit (donations, libéralités…) devront toujours être autorisés par le juge des tutelles.
Le mandant doit être en pleine possession de ses capacités. C’est d’ailleurs là que réside l’intérêt de ce dispositif, le mandant désignera une personne de confiance et lui accordera des pouvoirs sur certains biens si, et seulement si, ses facultés mentales ou corporelles venaient à être altérées. Dans l’hypothèse d’un patrimoine important, on peut désigner plusieurs mandataires pour partager la charge, et envisager, par exemple, de confier les actes courants à un responsable et les actes patrimoniaux à un autre.
Le mandat de protection future ne pourra entrer en application que si un médecin, inscrit sur une liste fournie par le Tribunal d’Instance du lieu de résidence du mandant, constate l’altération des facultés mentales ou corporelles de la personne concernée.
Si le mandat est activé, le mandataire devra réaliser un inventaire des biens du mandant. Il devra veiller à la bonne gestion du patrimoine du mandant et devra rendre compte au notaire une fois par an de sa gestion. Celui-ci s’assurera de la bonne exécution du mandat.
Le mandat prend fin en cas de :
- Rétablissement des facultés du mandant.
- Décès du mandant.
- Placement du mandant sous tutelle ou curatelle.
- Révocation du mandat par le juge.
- Renonciation au mandat.
Cette mission est généralement exercée à titre gratuit, mais le mandant peut prévoir une rémunération du mandataire. Le notaire prendra également des émoluments pour la rédaction et l’enregistrement du mandat, ainsi que pour son suivi éventuel s’il est mis en place.
Habilitation familiale
Ce dispositif, entré en vigueur en 2016, a pour objectif d’instaurer une nouvelle mesure de protection, afin de permettre aux familles d’assister et de représenter plus facilement des personnes vulnérables. Cette habilitation s’adresse à des majeurs dont les facultés mentales ou corporelles sont d’ores et déjà altérées et ne permettent plus de gérer le patrimoine. En cela, le dispositif diffère grandement du mandat de protection future.
Cette demande d’habilitation ne peut être réalisée que par un proche : les ascendants, les descendants, les frères et sœurs, le conjoint, le concubin ou le partenaire de PACS. Elle peut également être directement formulée par la personne à protéger ou par le procureur de la République.
L’habilitation peut être spéciale et ne porter que sur certains actes et certains biens ou être générale.
Le juge des tutelles du Tribunal d’Instance, du lieu où la personne à protéger réside habituellement, rendra sa décision à la suite de son audition et de l’audition des proches sollicitant l’habilitation. Il ne l’accordera pas automatiquement. Il peut décider de mettre en place une tutelle ou une curatelle ou encore de modifier l’étendue des pouvoirs de l’habilitation si celle-ci est accordée. Il peut habiliter une ou plusieurs personnes. L’habilitation est limitée dans le temps.
Un juge peut substituer une habilitation familiale à une mesure de curatelle ou de tutelle.
L’habilitation prend fin en cas de :
- Décès de la personne à l’égard de qui l’habilitation familiale a été délivrée.
- Placement de la personne sous sauvegarde de justice, sous curatelle ou sous tutelle.
- Jugement de mainlevée de l’habilitation.
- Absence de renouvellement à l’expiration du délai fixé.
- Accomplissement des actes pour lesquels l’habilitation avait été délivrée.
Cette mission est nécessairement exercée à titre gratuit.
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