
Protéger son conjoint est l’une des questions les plus souvent évoquées lorsque les clients poussent la porte de notre cabinet. Rien de plus naturel que de vouloir assurer le train de vie de son ou sa conjoint(e) en cas de décès ou d’accident. Les chiffres de l’Inserm montrent que plus de 100 000 adultes, de la tranche d’âge 25/65 ans décèdent chaque année en France. Le souhait de protection est donc parfaitement légitime.
Le terme de protection implique de prévoir un maximum de cas afin de vraiment protéger l’autre. Cette protection peut revêtir de nombreux aspects que nous allons détailler.
Concubinage/PACS/Mariage
Le mariage n’est évidemment pas le seul moyen pour un couple de vivre ensemble : le concubinage (3 millions de couples) et le PACS (1 million de couples) sont des modes de vie de plus en plus répandus. Leur nombre est tout de même à relativiser, comparé aux 12 millions de couples mariés.
Le mariage est déjà en soi une vraie protection. Nous vous conseillons la lecture de la fiche de synthèse comparative Concubinage/PACS/Mariage à ce sujet.
Vivre en concubinage, correspond juridiquement à être deux étrangers. Par exemple, si deux concubins ont un enfant ensemble, en cas de décès l’héritier est l’enfant. Peu importe la situation financière du conjoint survivant.
Le PACS est une première étape dans la protection de la personne avec laquelle on vit. En cas de décès, le partenaire survivant a un « droit temporaire au logement » d’un an et peut recevoir des biens issus de la succession, sans payer de droits de succession, à l’instar d’un conjoint marié. Il peut également recevoir des donations avec la même fiscalité que dans le cadre d’un mariage (abattement de 80 724 €). Néanmoins, ce contrat n’est réellement protecteur que s’il est accompagné d’un testament. Ainsi, en cas de décès, le partenaire survivant pourra être désigné comme légataire de tout ou partie de la succession, en fonction de la présence ou non d’enfants (sans avoir à payer de droits de succession).
Le mariage est une étape supplémentaire dans la protection. Il permet au conjoint survivant de bénéficier par exemple d’une pension de réversion et de mettre en place des avantages matrimoniaux.
Choisir le bon régime matrimonial
Chaque régime matrimonial présente des avantages ainsi que des inconvénients au regard de la protection du conjoint :
- Les régimes communautaires (communauté légale, communauté universelle) présentent l’avantage de répartir équitablement les richesses entre les époux permettant d’assurer un premier niveau de protection avant le règlement de la succession, mais peuvent se révéler inadaptés pour les chefs d’entreprise qui font supporter à leur communauté, tant leurs dettes professionnelles que personnelles.
- Les régimes séparatistes (séparation de biens notamment) présentent quant à eux, l’avantage de protéger le conjoint des dettes professionnelles du ou des époux, mais n’offre pas de protection d’un point de vue successoral dans la mesure où chaque époux conserve ses biens.
Le choix d’un régime matrimonial doit s’inscrire dans une stratégie sur le long voire très long terme, en fonction de la situation familiale et patrimoniale de chaque couple.
Par exemple, prenons le cas de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale, qui constitue le régime le plus protecteur pour le conjoint. Au premier décès, le conjoint survivant récupérera tous les biens du couple sans fiscalité. Néanmoins, les enfants subiront ensuite un contre coup fiscal lors du décès du conjoint, dans la mesure où ils paieront des droits de succession sur une seule transmission, perdant ainsi les exonérations dont ils auraient pu bénéficier lors du premier décès.
Dans ce cas, seule une appréciation globale des avantages et du coût de l’opération permettra aux conjoints de prendre une décision éclairée.
C’est pourquoi, un bon régime matrimonial est un régime souple accompagné des clauses de protection rédigées sur mesure en fonction de la situation du couple.
Bien utiliser les avantages matrimoniaux et les libéralités
Dans une famille, la loi fait des enfants, les héritiers prioritaires, par l’intermédiaire de la réserve héréditaire.
Pour rappel, un héritier réservataire est une personne physique qui en raison de son lien familial avec le défunt a droit à une part de la succession. Dans le cas d’un couple marié, cette question se pose surtout en présence d’enfants qui sont normalement réservataires à hauteur de :
- La moitié des biens en présence d’un enfant.
- Les 2/3 des biens en présence de deux enfants.
- Les 3/4 des biens en présence de trois enfants ou plus.
En l’absence d’enfants, c’est le conjoint qui est réservataire, à hauteur d’un quart des biens.
Si l’on estime que le conjoint survivant aura besoin de bénéficier d’une part importante du patrimoine pour assurer le train de vie, alors plusieurs solutions sont envisageables :
- Un premier niveau de protection grâce la donation entre époux ou le testament pour léguer à son conjoint le maximum autorisé par la loi compte tenu des droits réservataires des enfants. Le legs peut éventuellement aller au-delà de ce maximum, s’il est accompagné d’une Renonciation Anticipée à l’Action en Réduction (RAAR).
- Un second niveau de protection grâce aux avantages matrimoniaux, qui ont pour objet de gratifier son conjoint au stade par contrat de mariage et avant même le règlement de la succession. (Comment bien se servir des avantages matrimoniaux ?) Attention néanmoins, aux éventuels enfants d’un premier lit qui pourraient mener une action en retranchement.
Cette protection complémentaire peut être mutuelle ou unilatérale. C’est au couple de décider. De nombreuses solutions existent et il faut en parler avec un conseiller en gestion de patrimoine et/ou un notaire.
Adapter ses placements financiers
L’assurance-vie est un placement qui permet de désigner des bénéficiaires, afin de recevoir les sommes présentes sur le contrat au moment du décès de l‘assuré. Cela permet au conjoint survivant de recevoir des liquidités.
Fiscalement, il ne s’agit pas toujours du choix le plus intéressant car placer sur un contrat exonéré à la succession et en faire bénéficier son conjoint qui ne paye pas d’impôt n’a pas forcément de sens. C’est pour cela que la clause bénéficiaire doit être rédigée avec soin, cf : Les grands principes à suivre pour rédiger la clause bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie. Dans ces cas-là, une clause bénéficiaire démembrée peut permettre de faire économiser beaucoup de droits de succession aux enfants au second décès tout en protégeant d’une manière optimale le conjoint survivant : utiliser la clause bénéficiaire démembrée d’un contrat d’assurance-vie pour protéger le conjoint survivant sans alourdir sa succession.
Penser à la réversion peut s’avérer utile. Certaines rentes, notamment celles issues des placements d’épargne retraite, peuvent être reversées au conjoint survivant à la suite du décès du premier titulaire (cf : Quelle rente viagère choisir sur un contrat d’épargne retraite ?). Prévoir la réversion néanmoins diminuera le montant versé dès le début.
L’assurance décès (utiliser une assurance décès pour protéger son conjoint) est également une solution, en particulier pour les couples jeunes ayant une capacité d’épargne mais pas de capital constitué. Une assurance décès, quand on a entre 30 et 50 ans coûte relativement peu cher et peut permettre d’assurer un capital complémentaire au conjoint survivant ; ce sont néanmoins des cotisations à fonds perdus. Ces couvertures sont obligatoires pour les cadres. Souvent les grandes sociétés en mettent en place également pour les non-cadres. Attention donc à ne pas faire doublon.
Faire suivre les revenus issus du capital immobilier démembré
On l’oublie parfois, mais dans un couple avec des enfants, lorsqu’on prépare sa succession, très souvent les parents donnent aux enfants la nue-propriété de biens immobiliers. Ils se réservent alors l’usufruit afin de continuer à percevoir des revenus.
Il est alors possible de prévoir un usufruit successif pour le conjoint survivant, qui lui permettra de détenir l’usufruit de tous les biens donnés lors du premier décès, sans droits de succession dans la mesure où le conjoint en est exonéré.
Ce mécanisme assurera alors au conjoint survivant la perception des revenus comme avant le premier décès. (Protéger mon conjoint avec l’usufruit successif ?)
Stratégies patrimoniales
Protéger son conjoint est donc avant tout une question d’anticipation. De nombreuses stratégies existent, vous en trouverez ci-dessous certaines, pouvant être développées dans le cadre de la mise en place d’une approche globale :
Faut-il souscrire une assurance décès pour protéger son conjoint ?
Comment utiliser un contrat d’assurance-vie en co-souscription pour protéger le conjoint survivant ?
Quelle rente viagère choisir sur un contrat d’épargne retraite ? PER, PERP, Madelin…
Comment protéger son conjoint grâce à une donation au dernier des vivants ?
Comment protéger mon conjoint avec l’usufruit successif ?
Est-ce que je dois mettre en place un préciput afin de protéger mon conjoint ?
Comment bien se servir des avantages matrimoniaux ? Gérer le risque d’action en retranchement.
Pourquoi convertir son PEA en rente viagère ?